Les trottoirs s’envolent, le plan reste
Il faut bien le dire, le chantier de la rue Bourassa est une catastrophe à plusieurs niveaux. D’abord, c’est le cas de la durée. Commencé à la mi-juin et censé s’échelonner sur six semaines, le chantier est toujours en cours et on se demande bien, 14 semaines plus tard, ce qu’il fait encore là? Après tout, il s’agissait simplement d’enlever des trottoirs et d’en remettre un d’un seul côté de la rue. À la suite de mon intervention au conseil municipal du 19 septembre qui demandait qu’on explique les raisons de ce retard aux citoyens concernés, ceux-ci, dont moi, ont reçu une lettre explicative de la Ville. Pour cela, bravo et merci d’être à l’écoute!
Toutefois, était-il pertinent dans cette lettre d’écrire que « dans un premier temps, la mobilisation de quelques citoyens pour conserver les trottoirs du côté sud a retardé la démolition des trottoirs ». Pardon? On tient les citoyens responsables des échéanciers de travaux municipaux non respectés? Franchement! Quel message cela envoie-t-il aux Maskoutains qui souhaitent s’impliquer dans la démocratie municipale? (Pour mémoire, ces quelques citoyens sont M. Lévesque, qui est aveugle, Mme Robitaille, qui est sa conjointe, Piétons Québec, qui a publié une lettre ouverte dans Le Courrier pour souligner l’aberration d’enlever des trottoirs en 2022, ainsi que Sonia Chénier et moi-même, qui nous sommes fait poliment répondre par le conseil municipal que la Ville ne changerait pas d’idée.)
Ensuite et surtout dans la finalité. On se demande si tout ce travail et surtout cet argent, plus de 10 M$, amélioreront quoi que ce soit? Qu’essaie-t-on exactement de faire sur la rue Bourassa, une rue où il y a une école, un centre des loisirs et un parc? Est-ce un aménagement moderne et sécuritaire comme celui de l’avenue Laframboise devant l’école René Saint-Pierre, avec dos d’âne et passage piéton balisé par des feux clignotants? A-t-on profité de ces travaux majeurs, qu’on ne reverra pas d’ici 30 ans au moins, vu l’argent investi, pour améliorer la rue Bourassa et le quartier Saint-Sacrement en appliquant les meilleures pratiques d’urbanisme? Absolument pas!
A-t-on au moins profité des travaux pour rétrécir la rue afin de ralentir les voitures? Eh non, elle reste quasiment pareille.
A-t-on rajouté des emprises de trottoirs pour sécuriser les piétons aux coins des rues et ainsi obliger les automobilistes à faire de vrais arrêts? Pantoute.
Il est facile de pointer du doigt les employés municipaux ou l’entrepreneur indépendant pour tout ce cafouillage et l’été pourri qu’on a eu dans la poussière et le bruit depuis bientôt quatre mois. Mais ce que l’on doit surtout retenir, c’est qu’il s’agit d’une décision politique et seulement politique. Ce sont nos élu.e.s qui ont voté et décidé que ça se passerait comme cela et pas autrement.
Je ne veux pas passer pour un obsédé des trottoirs, mais quand on sait que nos élu.e.s refusent de déroger du Plan directeur des trottoirs voté en 2018 (d’ailleurs contesté à l’époque par une pétition d’au moins 800 signataires) et qu’on n’est qu’au début des travaux qui prévoient le retrait de 75 % des trottoirs dans le district Saint-Sacrement (64 % pour la ville au complet), laissez-moi vous dire que j’ai l’impression qu’on n’est pas sortis de l’auberge!
Si c’était au moins pour améliorer la qualité de vie des citoyens et pour faire de nos quartiers des modèles d’urbanisme, nous prendrions notre mal en patience. Mais non, le but avoué et répété est simplement de tout rabaisser au niveau des districts qui n’ont pas la « chance » d’avoir ça, eux autres, des trottoirs. Misère…
Car de la misère, il y en aura à voir nos taxes dilapidées pour refaire six coins de rue sans valeur ajoutée pour le transport actif, dans un contexte où les villes manquent de financement pour faire face aux changements climatiques.
Il faudrait peut-être ici revoir nos priorités?
Marc Bisaillon, coprésident de Saint- Hyacinthe unie et résident de la rue Bourassa